mardi 13 mai 2014

Que verrez-vous à l'exposition "Indiens des Plaines" au musée des arts primitifs ?

Le musée du quai Branly propose une exposition belle et facile sur les traditions esthétiques des Indiens des plaines des Etats-Unis. Le musée nous avait habitués à des sujets beaucoup plus pointus et présente cette fois un sujet qui résonne beaucoup plus dans nos esprits d'européens car nous avons tous été nourris d'images de ses indiens à longues plumes bicolores et de ses motifs Apache jusque dans les rayons de H&M.


La promesse est tenue. L'exposition s'ouvre sur des création contemporaine et le regarde des artistes Indiens d'aujourd'hui par le biais de motifs ou de techniques traditionnels (c'est d'ailleurs la partie la plus intéressante). Ensuite, les salles nous emmènent à travers l'histoire des différents peuples et l'évolution de leurs créations. Bijoux, objets sacrés, vêtements, outils, divertissement : leur création est exhaustivement présentée. On reste rêveur face à certaines représentations mystiques et curieux de toute cette symbolique dont le sens échappe tout à fait à nos esprits.

C'est là que malheureusement se situe aussi la faiblesse de l'exposition : on pourrait être fascinés par la connexion qu'entretenaient les Indiens avec la nature et l'au-delà, mais aucune clé n'est donné au long de l'exposition pour comprendre ni même pour décrypter la spiritualité de ses peuples. Il faut pour cela s'acquérir du catalogue, évidemment, et c'est très dommage. J'en ai gardé un goût amer d'incomplétude qui laisse finalement ce sentiment : l'exposition est jolie et facile, mais sans plus.
On garde l'impression de rester dans le cliché et surtout le consensuel : l'histoire tragique de ces peuples, les guerres, l'extermination et le "parcage" en réserve d'aujourd'hui sont complètement éludés.

Coiffe, vers 1830, artistes Osages, Kansas
J. Okuma, chaussures sabots, 2014

Cape d'apparat, population Sioux Mandan

Votre visite du musée des arts primitifs se rattrape plutôt sur l'exposition Tatoueurs Tatoués qui est en revanche très bien documentée.


Informations pratiques sur l'exposition "Indiens des Plaines" au musée des arts primitifs :


Jusqu'au 20 juillet 2014 - Mardi, mercredi et dimanche de 11h à 19h ; jeudi, vendredi et samedi de 11h à 21h
Durée de visite : 45 min
L'affluence est faible sur cette exposition. La visite se prête très bien à toute la famille. Il existe un livret jeu pour les enfants ainsi qu'un dossier pédagogique rudimentaire.
9€ / TR 7€ et de nombreuses gratuités notamment pour les -25 ans

L'exposition sur le site du musée des arts primitifs

Photos : de très belles images dans cet article, et aussi ici

Constance Jacquot

dimanche 11 mai 2014

L'exposition d'Henri Cartier-Bresson au Centre Pompidou : un siècle d'histoire en photographies

L'exposition d'Henri Cartier-Bresson au Centre Pompidou est sans conteste l'une des expo parisiennes immanquables de l'année.


Henri Cartier-Bresson (1908-2004) est un emblème de la photographie française. Il a traversé le XX° siècle et immortalisé de nombreux évènements marquants, sous un angle non-consensuel et en imposant son regard.

Beaucoup de public est accueilli dans cette expo à Beaubourg, ce qui gêne la visibilité des pièces de petit format à certaines heures. Heureusement, la gestion du flux de visiteurs est intelligente : le temps d'attente est indiqué à l'entrée du Centre Pompidou, la queue est minutée à l'entrée de l'exposition et on peut lire la biographie du photographe sur quelques mètres de mur en patientant. Et surtout, le musée est ouvert jusqu'à 23h, après 19h le week-end et 20h30 en semaine, la visite est très tranquille.

L'exposition est à la fois chronologique et thématique, et transmet la richesse de la vie de Cartier-Bresson et la variété de son travail. De son vivant, il supervisait ses expositions et uniformisait les tirages ; le choix des regroupements dans la scénographie de cette rétrospective casse cette unité. Les salles ne se ressemblent pas, j'ai particulièrement été touché par les photographies surréalistes et abstraites, et par celles des grands événements de l'histoire.

Le surréalisme dans les photographies d'Henri Cartier-Bresson


Henri Cartier-Bresson, Livourne, 1933

L'instant était décisif


Grâce à son ouverture intellectuelle, ses voyages et son attrait pour plusieurs disciplines créatives dès la jeunesse -avant de devenir photographe, il a touché en amateur à la peinture et au dessin-, il fréquente rapidement le milieu artistique dont les surréalistes.

Le surréalisme est subtil dans ces clichés : les corps sont déformés, le sujet du rêveur est récurrent, la déambulation et le jeu sont souvent représentés. Une série prend comme sujet des objets et personnes empaquetés et voilés, en créant le suspense, dans une espèce d'érotisme de l'objet. Il nous sensibilise à l'attitude et au hasard, valorisé comme une "magie circonstancielle", car en photographie le hasard est objectif car il constitue les arrière-plans.

Un autre point de vue sur l'actualité



Le couronnement de George VI le 12 mai 1937

Libération du camps de Dessau en 1945

Dans sa longue carrière, Henri Cartier-Bresson s'est impliqué dans une photographie sociale, visant à dénoncer les plus démunis. Son engagement est même politique : il est actif en 1936 dans l'Association des Ecrivains et Artistes Révolutionnaires, a travaillé pour le journal communiste Le Soir pour lequel il a fourni des clichés des premiers congés payés, a immortalisés les camps à la sortie de la seconde guerre mondiale, entre autres.
Ces photographies de presse et des grands événements m'ont semblé les plus intéressants, par exemple celles du couronnement de George VI en Angleterre sur lesquelles il choisit d'immortaliser le public plutôt que l'action elle-même et nous oriente notre regard différemment.


Les phrases pour faire genre-je-l'ai-vu-alors-qu'en-fait-non :


  • "Les tirages sont vraiment petits, va boire un verre chez Georges avant d'y aller, pas avant 21h30, sinon tu ne vois rien."
  • "Il a vraiment immortaliser des morceaux d'histoire qu'on n'apprend pas dans les livres, comme les premiers congés payés, avec des gens sur la plage, c'est passionnant."
  • "Cartier-Bresson tient de l'artistique et du reportage à le fois, quelle polyvalence et quel talent !"

Informations pratiques sur la rétrospective d'Henri Cartier-Bresson au Centre Pompidou :


Jusqu'au 9 juin 2014

Horaires : du mercredi au dimanche de 11h à 23h
Tarif : de 9€ à 13€, les prix des pass annuels commencent à 18€

Durée de visite : 1h15


Constance Jacquot



Expo Van Gogh - Antonin Artaud : "le suicidé de la société"

Le musée d'Orsay propose au public un regard original sur l'oeuvre de Van Gogh dans cette exposition mise en scène selon le texte d'Antonin Artaud Van Gogh le suicidé de la société. Une exposition pointue et saturée de visiteurs, qui n'est pas un moment de plaisir et de détente.


Ces artistes ont tous deux été internés en psychiatrie dans leur jeunesse et Antonin Artaud, à la création tumultueuse, était bien placé pour écrire sur la lucidité et la conscience, et leur absence, dans la processus artistique.

L'exposition Van Gogh - Antonin Artaud donne un nouveau regard sur l'oeuvre très connue du peintre. On y contemple une quarantaine de tableaux, mais aussi des lettres, et des pièces consacrées aux dessins d'Antonin Artaud, que la plupart d'entre nous n'aurons certainement jamais vues. On y retrouve tout de même des œuvres phares telles que La Nuit étoilée, La Chambre de Van Gogh à Arles, et des autoportraits.

Van Gogh, La Nuit étoilée, 1888
Van Gogh, La Chambre de Van Gogh à Arles, 1889
Van Gogh, Portrait de l'artiste au chevalet, Paris, 1888
Le musée d'Orsay propose des croisements intéressants entre les deux œuvres et la mise en scène est réellement soignée et participe pleinement au parcours du visiteur. Cependant, l'exposition est très riche d'informations et nécessite beaucoup de concentration, ce qui n'est pas évident lorsqu'on piétine au milieu du flot très dense de visiteur ; en plus de la queue habituelle pour entrer dans le musée, on attend également à l'intérieur aux portes de l'exposition.

Que ce soit concernant Van Gogh ou Antonin Artaud, on comprendra surtout le sens de certaines œuvres, les évènements qui ont enclenché leur conception, le contexte de travail du peintre, et d'autres éléments complémentaires de notre connaissance de Van Gogh, notamment grâce des cartels généreux. Néanmoins, je n'ai trouvé aucune information complémentaire sur le site du musée, contrairement aux expositions précédentes.

Pour vous donner une idée de la précision de l'exposition, quelques exemples de concepts que j'ai pu retenir :

  • Le Fauteuil de Gauguin symbolise la tension entre les deux amis (Van Gogh et Gauguin), l'ombre violette symbolise leurs caractères opposés

Van Gogh, Le Fauteuil de Gauguin, 1888

  • Son psychiatre, le Dr Gachet, l'obligea à peindre jusqu'au bout malgré sa maladie. Passionné d'arts, il offrit à Van Gogh un confort matériel propice à la création. Le peintre, doutant de son professionnalisme, ne reste qu'un mois et demi chez lui, mais cette période reste mystérieuse. Les œuvres de cette époque, entachées par la réputation de faussaire que traîne le Dr Gachet, ont fait l'objet d'une exposition à Orsay en 1999.
  • Dans ses dessins, Antonin Artaud avait pour objectif de reconstituer l'unité corps-esprit détruite par la maladie et les électrochocs.

Informations pratiques sur l'exposition Van Gogh - Artaud au musée d'Orsay :


Jusqu'au 6 juillet 2014

Du mardi au dimanche de 9h30 à 18h (dernier accès billetterie à 17h), le jeudi jusqu'à 21h45
Je vous recommande vivement de venir à l'ouverture, quelque soit le jours de la semaine ; il y a beaucoup de monde à la nocturne. Réserver un billet coupe-file ne vous dispensera pas du monde dans l'expo.
Gratuit pour les 18-25 ans sans réservation, avec réservation : 11€-TR 8.5€

Durée de visite : 45min


Constance Jacquot