dimanche 21 avril 2013

Avis sur l'exposition "Chagall, entre guerre et paix" au musée du Luxembourg

Avis sur l'exposition "Chagall, entre guerre et paix" au musée du Luxembourg : est-elle à voir ou non ? Si vous ne connaissez pas Chagall, cette exposition est l'occasion parfaite pour découvrir les œuvres de ce peintre poétique et à part des courants du XXe siècle, et de comprendre les liens entre sa vie et son travail. Néanmoins, pour ceux qui connaissent au contraire le peintre, l'histoire racontée dans l'exposition vous sera déjà bien connue.

L'exposition "Chagall, entre guerre et paix" retrace la vie et l'oeuvre de l'artiste au rythme de la première et de la seconde guerre mondiale qui ont eu un impact d'autant plus profond qu'il était russe et juif.
Très attendue, elle accueille énormément de monde, j'ai quelques conseils de visite pour vous.

La première guerre mondiale 

 

Chagall, L'autoportrait aux 7 doigts, 1912
Tout commence à Paris vers 1910, où le jeune artiste rencontre plusieurs de ses pairs avant-gardiste et s'imprègne de quelques unes des formes cubistes et surréalistes qu'on retrouve dans ses peintures.

Il rentre quelques années plus tard en Russie dans son village natale de Vitebsk et épouse Bella. Leur amour et le bonheur qu'il partage est présent de façon récurrente dans les œuvres de Chagall : le couple plane souvent au-dessus du ou des sujets, j'ai toujours interprété cela comme le sentiment de protection et d'immuabilité que Chagall devait ressentir avec elle, et cette représentation touche évidemment beaucoup ma sensibilité romantique.
Durant la guerre, son travail -plutôt des dessins- est un témoignage de la vie quotidienne à Vitebsk, qui est une ville-garnison. Il montre également les rituels de la vie juive. Cette partie de l'exposition m'a permis de prendre conscience de tout un pan de l’œuvre de Chagall que ne connaissais pas, plus grave et très ancrée dans le réelle, mais tout aussi personnel que ces sujets oniriques présentés après.
Durant cette période, il traite aussi bien des sujets très sombres de la guerre que de son bonheur conjugal. C'est surprenant, choquant, et certainement beau, de voir comment le prisme de l'amour peut tout rendre acceptable.

L'entre-deux-guerres en France

 

A cette période, Chagall illustre notamment la Bible.  D'autre part, il utilise de plus en plus des images de rêves dans ses tableaux, sans pour autant avoir rien à voir avec les surréalistes, crée des êtres hybrides, des animaux de toutes les couleurs, et développe des symboles aux significations multiples, toujours avec l'image du couple planant au-dessus de cet univers.

L'exil aux Etats-Unis pendant la seconde guerre mondiale

 

Contraint de s'exiler, ses tableaux deviennent plus sombres. La représentation de la crucifixion devient récurrente.
En 1944, Bella décède, le traumatisme est tel que Chagall cesse de peindre un temps. S'en  suivent 2 années de deuil durant lesquelles il ne fait que de lui rendre hommage. En 1946, sa nouvelle compagne lui donne un fils et le thème du couple revient dans ses toiles, toujours avec le souvenir de Bella.
Chagall, Songe d'une nuit d'été, 1939


Chagall, Autour d'elle, 1944


L'après-guerre

 

De retour en France, Chagall s'installe à Vence. La joie et la couleur gagnent progressivement ses peinture, et le couple est toujours omniprésent grâce à sa nouvelle compagne en 1952.
Chagall, La Danse, 1950
Le musée du Luxembourg a réalisé un parcours détaillé de l'exposition en ligne très clair et accessible.

Avant toute visite, sachez que "Chagall, entre guerre et paix" est une exposition qui attire beaucoup de monde, le temps d'attente est proportionnel à son succès. J'y suis allée un dimanche midi, l'attente était de 2h pour les visiteurs sans billet. Vous pouvez acheter vos billets coupe-file en ligne ou prendre la carte Sésame + annuelle, qui est très rentable (par exemple, 22€ pour les - 26 ans).
Dans tous les cas, la circulation est difficile à l'intérieur du musée du Luxembourg. La scénographie a été bien pensée -pour une fois-, les salles sont plutôt spacieuses, mais il reste difficile de bien voir toutes les peintures avec la foule. Je préconise donc d'attendre mai-juin pour visiter l'exposition, et je ne suis pas la seule de cette avis, voici les prévisions de www.jaimeattendre.com, experts sur le sujet :
Ce tableau est issu du guide des expositions parisiennes sans attendre par "J'aime attendre" que vous pouvez télécharger intégralement et gratuitement
Informations pratiques sur l'exposition "Chagall, entre guerre et paix" au musée du Luxembourg :
Durée de visite : 40 minutes minimum si vous pouvez voir les tableaux
Tous les jours de 10h à 19h30 et le dimanche de 9h à 20h
Nocturne le lundi* et le vendredi jusqu’à 22h
Fermeture le mercredi 1er mai
(* sauf lundis fériés 1er avril et 20 mai, fermeture à 19h30)
Tarif : 11€ / TR : 7,5 € => Réservez vos billets !!

vendredi 12 avril 2013

Avis sur l'exposition " Linder, femme/objet " au musée d'Art Moderne de la ville de Paris

Avis sur l'exposition "Linder, femme/objet" au musée d'Art Moderne de la ville de Paris : est-elle à voir ou non ? Je ne la classerais pas parmi les must-see de la saison.

L'exposition présente plusieurs facettes du travail de Linder : photographies et photomontages principalement, mais aussi mode, musique et vidéo. La rétrospective est ainsi complète et permet d'embrasser toute la carrière de l'artiste, on découvre ces premièrs travaux composés d'images découpées dans les magazines pour finir par les montages réalisés sous Photoshop.

Linder a investit la scène artistique à l'époque où émergeait le punk (76-77) et a logiquement utilisé son art dans un but contestataire. Tout son travail est trempé de féminisme, son combat, et dénonce la femme utilisée et écrasée par la société. La femme ultra-érotisée, à laquelle nous sommes habitués dans les médias et particulièrement la publicité, et que nous remarquons à peine, est isolée de son contexte pour apparaître dans toute sa violence et est mise en scène de façon ridicule avec ses objets du quotidien.


Linder, Sans titre, 1976
 
Linder, Sans titre, 1976
 
Linder, Sans titre, 1976

L'oeuvre de Linder et son message sont clairs et percutants, j'irai même jusqu'à dire qu'il manque de subtilité. Son travail a quelque chose  de trop évident, de trop facile, nous sommes quotidiennement confrontés aux visuels qu'elle utilise et détourne et à ses idées féministes certes fondamentales (l'ultra érotisation, la soumission ménagère, etc) mais rabachées. Peut-être que ce point de vue vient du fait que j'appartiens à une génération qui a toujours entendu ces contestations, des personnes plus âgées auront certainement un autre regard.
Enfin, le mieux est encore d'écouter Linder parler de son travail :

LINDER Femme/Objet par paris_musees

Néanmoins, cela rend l'exposition accessible à tous (sauf les enfants, certains travaux sont très érotiques), même ceux qui n'ont pas l'habitude des musées ; le procédé de collage est plutôt ludique.

Linder, Revolutionary hardcore, Formula IX, 2010

Linder, Sans titre, 1977

Au-delà du contenu, l'exposition " Linder, femme/objet " est très agréable à visiter : elle se déroule au premier étage du musée d'Art Moderne de la ville de Paris, il y a peu de monde et la scénographie est spacieuse avec certaines thématiques d'oeuvres masquées par des rideaux qui rendent la surprise complète et le choc plus important ! En plus, cette exposition n'est vraiment pas chère : 6€ !

Le catalogue de l'exposition Linder est très sympa, sous forme de magazine, on y retrouve pour 24€ toutes les oeuvres de l'exposition qui au-delà de leur portée sont tour à tour drôles, esthétiques et renvoient facilement à des souvenirs personnels.

Infos sur l'exposition "Linder, femme/objet" au musée d'Art Moderne de la ville de Paris :
Jusqu'au 21 avril 2013
Durée de visite : 45 minutes
Du mardi au dimanche de 10h à 18h, jusqu'à 22h le jeudi
Tarif : 6€ / TR : 3€

lundi 1 avril 2013

Avis sur le livre "Aimer (quand même) le XXI° siècle" de Jean-Louis Servan-Schreiber

Aimer (quand même) le XXI° siècle de Jean-Louis Servan-Schreiber : est-il à lire ou non ? C'est un livre plein d'optimisme et qui donne à réfléchir, tout en restant accessible à un large public. Le style est clair et absolument pas pédant, contrairement à ce dont je m'attendais.

Jean-Louis Servan-Schreiber est d'une grande justesse, il ne verse dans aucun excès pour nous livrer ces quelques clés pour mieux vivre notre époque. Il démontre que même si nous avons l'impression que tout était mieux avant du fait des problèmes économiques, nous vivons mieux qu'il y a 50 ans, et les avancées technologiques sont tout de même porteuses d'espoir.

Le centre de sa réflexion est à propos du numérique et de ses conséquences, dans le contexte d'incertitude que nous peinons à éviter.

Le numérique a, depuis 15 ans, radicalement changé nos vies, de façon comparable à l'invention de l'imprimerie au XV° siècle, ce qui permet à l'auteur de comparer le XXI° siècle à une nouvelle Renaissance. Mais cela ne va pas sans paradoxe ni inconvénient.
Notre mémoire s'externalise de plus en plus, grâce aux informations disponibles sur internet et sur nos machines constamment à portée de main. Cette réalité accroît notre dépendance à ces machines, ce qui crée invariablement un stress.
La disponibilité de ces technologies sensées faciliter notre vie et notamment la communication peuvent nous plonger au contraire dans la solitude. Cette hypercommunication, rendue possible grâce à l'omniprésence des appareils mobiles, devient excessive, encombrante et donc difficilement gérable. On pourrait potentiellement connaître des millions de personnes mais nous n'en choisissons que quelques unes. Nos liens avec autres peuvent devenir multiples avec facilité mais demeurent toujours aussi faibles, l'omniprésence d'écrans font au sens étymologique du terme "écran" justement. Le numérique et l'évolution qu'a pris notre mode de vie devenu très individualiste, avec par exemple l'éclatement de la famille, l'augmentation des temps de trajet, génère plus de solitude qu'avant, parfois subie, parfois choisie, et nous force à une grande adaptabilité entre moments seuls et en groupes, même avec des gens qu'on ne choisit pas (au travail...).
Le virtuel est devenu notre nouveau réel et la période d'adaptation durera sans doute encore une ou deux décennies.

Cette technologie, comme beaucoup, permet de répondre à nos désir, tout en en créant de nouveaux, mais ne répond pas au vide de notre âme.

En plus de ce thème centrale récurrent, Aimer (quand même) le XXI° siècle aborde aussi, entre autres, la perte des racines, des repères, des croyances, l'accélération incontrôlable du quotidien (que Servan-Schreiber a déjà traité dans Trop vite !), la surinformation... Pour lui, le plus grand enjeux auquel nous avons à faire est la préservation de la planète.

J'espère que ces quelques lignes vous auront donné envie d'en lire plus car n'importe qui peut puiser de l'espoir dans les pages d'Aimer (quand même) le XXI° siècle et ça fait du bien !


Constance Jacquot